Monday, July 16, 2012

BELGIQUE : A BOUT DE SOUFFLE, LES RÉSEAUX ?






La montée en puissance des productions renouvelables décentralisées révèle la fragilité du réseau électrique belge. La réponse la plus pertinente viendra-t-elle d’un simple (et coûteux) renforcement des lignes ? Ou plutôt de l’ingéniosité des opérateurs concernés ?

L’incident est passé d’autant moins inaperçu qu’il a été accompagné d’un coup d’éclat médiatique des citoyens concernés : début mai, plusieurs particuliers, sur les hauteurs de Le Roux (Fosse-LaVille) ont eu la désagréable surprise de voir leur installation photovoltaïque mise automatiquement en sécurité, suite à une surcharge du réseau basse tension. Ce n’était pas la première fois qu’un tel incident se produisait (un cas similaire a été constaté à Habay), mais cette fois, la perte de revenus a fait réagir les intéressés. Et ORES, le gestionnaire de réseau, a été prié de s’expliquer face aux journalistes. Sur cette portion du réseau, on est en présence d’une ligne basse tension très actuelle (400 V + N en triphasé) parfaitement capable d’assumer le transport de productions décentralisées dans des conditions pré-vues, mais qui semble avoir été victime d’une accumulation d’éléments « exceptionnels » : un taux de raccordement photovoltaïque qui frise les 33 % sur une ligne de 560 mètres dont les premières portions assument le gros des injections électriques solaires. 



D’où la surcharge et la mise hors tension de ces installations solaires. Laissons provisoirement de côté les questions (non moins pertinentes) relatives aux droits et devoirs des uns et des autres en la matière et voyons les solutions techniques envisageables. Celles qui ont été mises en oeuvre par Ores à Fosse-La-Ville tombent sous le sens. Dans un premier temps, on reconfigure le réseau pour faire face aux « déséquilibres » de production sur la ligne en reprenant les productions incriminées sur un circuit provenant d’une autre cabine et ensuite on planifie la pose de nouveaux câbles, là où cela s’avère nécessaire. Mais tout cela a un coût (tout particulièrement la pose de nouvelles lignes) et la saine gestion des deniers publics impose d’y aller de manière mesurée.

Comme en témoigne le rapport final du groupe de réflexion REDI (1) remis par la CWaPE au gouvernement wallon en début d’année, « Une transition réfléchie s’impose, qui tienne compte de toutes les réalités techniques, économiques, environnementales et sociales de notre marché. (…) La difficulté consiste donc ici à permettre et encourager l’éclosion progressive – voulue par l’Europe et la Wallonie – de petites productions locales souvent intermittentes, tout en préservant la sécurité du réseau et donc le nécessaire équilibre entre production et consommation, sans pour autant imposer systématiquement dans l’immédiat des aménagements souvent coûteux, décidés au coup par coup... ». 

Un exercice d’équilibrisme donc, qui – crise financière oblige – demandera sans doute, pour être pratiqué à moindre coût, un supplément d’ingéniosité (on ne parlera pas ici d’intelligence pour ne pas se tromper de débat) de la part des acteurs en présence, en ce compris les particuliers. Sur base d’une réflexion de longue haleine avec les professionnels, le rapport REDI a montré que la marge de manœuvre actuelle peut être élargie de manière simple sans modifier fondamentalement les règles de fonctionnement actuelles. Une bonne information au bon moment, quelques dispositions pratiques bien ciblées, une bonne coordination de l’ensemble des acteurs en présence et un peu de bonne volonté peuvent sans doute permettre d’aller de l’avant vers l’objectif européen Energie-Climat 2020 sans se lancer dès à présent dans de vastes investissements réseau.



C’est aussi ce que tendent à démontrer les expérimentations lancées en Flandre dans le cadre du projet de démonstration MetaPV initié par le bureau d’études 3E. Lancé conjointement en 2009 à travers une collaboration européenne regroupant le marché (principalement les opérateurs régionaux dont le GRD Infrax et la société d’investissement LMR), l’industrie (entre autres le producteur allemand de transformateurs SMA Solar Technology) et le monde de la recherche (3E, mais aussi l’université de Ljubljana et l’institut autrichien de technologie), ce projet s’est donné pour objectif de permettre à un même réseau d’accueillir jusqu’à 50 % de productions photovoltaïque supplémentaire tout en rendant l’ensemble du système plus performant. Au total, 128 installations résidentielles et 31 sites de production industrielle seront testés sur les territoires de Lommel et Opglabbeek. Si l’expérience s’avère probante, cette technologie pourrait être généralisée à un coût dix fois inférieur à un renforcement traditionnel de réseau. Le terme tant galvaudé de « réseau intelligent » retrouverait alors tout son sens. 

(1) « Les priorités en matière de développement des réseaux », rapport final Redi (Réseaux Electriques Durables et Intelligents) – 22 janvier 2012

pour aller plus loin : www.cwape.be

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